Procédure d'appel
Le décret du 9 décembre 2009, dit décret MAGENDIE, dont un des objectifs était d’accélérer la mise en état et par là même, l’examen des dossiers par les Cours d’appel, recèle de nombreux pièges et chausse-trapes.
C’est ainsi que de multiples délais, assortis de sanctions immédiates, ont été imposés.
A ce titre, l’intimé, auquel aucun délai légal pour conclure n’était imposé avant le décret, a tout intérêt à présent à être particulièrement vigilant quant à la date de notification des conclusions de l’appelant.
En effet, au regard des dispositions de l’article 909 du Code de procédure civile, l’intimé dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de 2 mois, à compter de la notification des conclusions de l’appelant prévues à l’article 908 pour conclure et former, le cas échéant, appel incident.
La question se pose donc régulièrement de savoir si l’intimé, qui n’a pas conclu (ou qui a conclu une première fois tardivement) dans le délai de l’article 909, serait malgré tout recevable à répliquer à de nouvelles écritures déposées par l’appelant (qu’elles contiennent ou pas de nouveaux moyens).
On sent bien à ce stade que se pose en effet un problème quant au respect du principe de la contradiction.
Serait-il normal qu’une partie perde tout droit de répliquer à des moyens nouveaux ?
La Cour de cassation n’a jusqu'à présent pas répondu à cette question et la réponse apportée par les Conseillers de la mise en état de la Cour d’appel de RENNES est jusqu'à présent très différente d’une Chambre à l’autre, voir au sein d’une même Chambre, d’un Conseiller à l’autre !
Cela ne facilite évidemment pas le travail du praticien…
C’est ainsi que par ordonnance du 4 juin 2013, le CME de la 6ème Chambre section A (Chambre de la famille) a très sèchement retenu :
« Attendu aux termes de l’article 909 du CPC, que l’intimé dispose, à peine d’irrecevabilité soulevée d’office, d’un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant pour conclure.
Attendu que les premières conclusions en date du 12 février 2013 de Mr X…ont été déclarées irrecevables, qu’il ne peut donc valablement prendre de nouvelles écritures au regard des dispositions de l’article 909 ».
Or quelques jours avant (ordonnance du 15 mai 2013), le CME de la 4ème Chambre (Chambre de la construction) avait quant à lui estimé :
« A la suite de l’ordonnance rendue le 21 novembre 2012(qui avait déclaré irrecevables les conclusions de la société A….), aucun calendrier de procédure n’a été établi, ce dont il résulte que par application des dispositions de l’article 954 du Code de procédure civile, il était permis aux parties de continuer de conclure.
Les dispositions des articles 908 et suivants du même code ne visent que les premiers échanges de conclusions, aucun texte ne venant sanctionner les échanges de conclusions postérieurs.
Dés lors, en déposant un second jeu de conclusions, contenant de nouveaux moyens et de nouvelles pièces, le 20 septembre 2012, Mr H…a ouvert in droit de réponse à la société A…
En effet, tant le principe du contradictoire que celui du droit à un procès équitable s’opposent à ce que les sanctions réglementaires susvisées puissent permettre à une partie, en se prévalant de l’irrecevabilité de conclusions antérieures de son adversaire, de continuer à développer son argumentation contre lui sans qu’il lui soit permis d’y répondre en défense.
Par conséquent, Mr H…est débouté de sa demande visant à voir déclarer irrecevables les conclusions du 7 mars 2013 de la société A… ».
Il est donc, en l’état, difficile d’y voir clair.
Il semble toutefois, qu’autoriser l’intimé à conclure en réponse après l’expiration du délai de l’article 909, reviendrait à vider de sa substance cet article, étant cependant ajouté qu’il n’est pas prévu par le décret MAGENDIE que l’appelant puisse lui aussi conclure à nouveau sans y être autorisé.
En effet, au visa de l’article 912 du CPC, le CME doit en principe, examiner l’affaire dans les quinze jours suivant l’expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces et fixer la date de la clôture et des plaidoiries. Toutefois, si l’affaire nécessite de nouveaux échanges de conclusions, il en fixe le calendrier, après avoir recueilli l’avis des avocats.
Dans la pratique (en tous cas devant la Cour d’appel de RENNES) cela n’est jamais le cas, ce qui entraine des dérives qui n’ont pas été prévues par le décret du 9 décembre 2009.
Au final, il appartient au conseil de l’intimé d’être très vigilant et d’attirer particulièrement l’attention de son client en début de procédure d’appel sur l’importance d’être prévenu au plus tôt de toute notification de conclusions qui pourraient intervenir par acte extrajudiciaire et qui déclencherai le délai de l’article 909 du CPC.