Choix du prénom : une liberté toute relative
Maître Franck LOYAC, avocat en droit de la famille à RENNES (35), vous informe.
L’article 57 du Code civil prévoit notamment que les prénoms de l’enfant sont choisis par ses père et mère et que lorsque ces prénoms ou l’un d’eux, seul ou associé aux autres prénoms ou au nom, lui paraissent contraires à l’intérêt de l’enfant ou au droit des tiers à voir protéger leur nom de famille, l’officier de l’état civil en avise sans délai le procureur de la République. Celui-ci peut saisir le juge aux affaires familiales.
Si le juge estime que le prénom n’est pas conforme à l’intérêt de l’enfant…il en ordonne la suppression sur les registres de l’état civil. Il attribue le cas échéant, à l’enfant un autre prénom qu’il détermine lui-même à défaut par les parents d’un nouveau choix qui soit conforme aux intérêts sus visés.
Tout le monde se souvient de la famille RENAULT qui avait donné le prénom Mégane à leur fille, ce à quoi s’était opposé le procureur de la République.
C’est à une affaire assez similaire qu’a été confrontée la chambre du droit de la famille de la Cour d’appel de RENNES qui a eu à statuer par arrêt du 25 janvier 2016.
Mr et Mme X ont en effet donné naissance à un garçon qu’ils ont prénommé : Léo-Pard.
A l’initiative de l’officier d’état civil, le procureur de la République a fait citer les parents devant le juge aux affaires familiales afin de faire modifier le premier prénom de l’enfant.
Par jugement du 15 janvier 2015 le juge aux affaires familiales du TGI de RENNES a fait droit à cette demande.
Sur l’appel interjeté par les parents (faisant notamment valoir que Léopard est un nom d’animal, mais aussi le prénom d’un Saint du calendrier grégorien) le ministère public conclut à la confirmation en relevant qu’aucun prénom n’emprunte directement un nom d’animal en France, les seuls prénoms pouvant être les plus approchants étant Hermine, Colombe et Agnel et qu’il ne peut être considéré comme conforme à l’intérêt d’un enfant d’être nommé comme un animal, ajoutant que les parents sont libres d’utiliser tout surnom positif à leurs yeux pour appeler leur fils dans l’intimité, mais que leur volonté personnelle n’est pas légitime à être officiellement reconnue par l’état civil en raison de l’intérêt de l’enfant qui s’inscrit dans la société au sens large ;
La chambre du droit de la famille de la Cour d’appel de RENNES considère que c’est à juste titre que les premiers juges, après avoir relevé que le prénom Léo-Pard n’est pas un prénom actuellement porté en France, mais qu’il s’agit d’une référence directe à l’animal du même nom, que le léopard est un animal noble et fort, mais aussi dangereux, impressionnant, qui peut engendrer un sentiment de crainte, que le fait pour un enfant, de porter le nom d’un animal, peut être préjudiciable à l’enfant et lui attirer des moqueries de son entourage, ont dit que l’intérêt de l’enfant est incontestablement de voir modifier le prénom qui lui a été attribué à la naissance.
La Cour ajoute que l’attribution d’un prénom à un enfant marque l’entrée de celui-ci dans le groupe familial, lequel affirme sa volonté, sa fantaisie et son esprit d’imagination, sous le contrôle du juge, gardien de l’intérêt de l’enfant et de cohésion sociale, eu égard au principe d’ordre public d’indisponibilité de l’état des personnes.
Les juges de la Cour d’appel de RENNES estiment que le prénom Léo-Pard repose sur un jeu de mots évoquant directement le félin léopard, qu’un enfant bénéficie pendant sa minorité d’un statut protecteur eu égard à sa faiblesse et à son immaturité.
La cour précise en outre que le rattachement symbolique de l’enfant issu du couple, par son prénom, avec un léopard, connu pour être un prédateur, est susceptible d’être source de railleries pour lui du fait de l’imaginaire enfantin, de cette singularité unique, qui ne favorise pas le sentiment d’appartenance à un groupe familial et du vivre-ensemble.
Enfin pour répondre à l’argument des parents, la Cour rétorque que la référence culturelle invoquée par les parents, selon laquelle Léopard serait le prénom d’un Saint martyr romain au 4ème siècle, ne fonde aucune tradition française dans l’attribution de ce prénom.
La Cour conclut en précisant que c’est à bon droit que les premiers juges ont dit que l’enfant se prénommera désormais Léo.
Votre avocat en droit de la famille à RENNES (35), Maître Franck LOYAC, vous conseille et vous assiste.